Lubrizol : dans le pays de Bray, les agriculteurs craignent un préjudice moral et financier plus élevé
Dans le pays de Bray, les agriculteurs sont très inquiets. La raison : le préjudice moral et financier pourrait s’alourdir après l’incendie de l’usine Lubrizol, survenu le 26 septembre 2019. Ils sont plusieurs dizaines à exprimer leur émotion face aux restrictions de récoltes.
« Si le 11 octobre l’arrêté n’est pas levé, comment vais-je faire ? »
Les agriculteurs du pays de Bray ne savent plus où donner de la tête, deux semaines après la catastrophe de Lubrizol. Ils craignent que leur situation devienne intenable si les restrictions agricoles ne sont pas levées cette semaine. « Je n’ai plus que trois jours d’alimentation pour mes bêtes. À cause de la sécheresse, nous avons déjà dû puiser dans nos stocks. Si le 11 octobre l’arrêté n’est pas levé, comment vais-je faire ? », s’inquiète un éleveur. « J’ai 120 vaches, il me faut environ 20 tonnes de maïs par jour. Même si une solidarité se met en place entre nous, personne n’est capable de livrer autant sur plusieurs jours, explique un autre. Je vais être obligé d’arrêter la production de lait, mais je n’ai pas les moyens de payer un constat d’huissier pour évaluer mes préjudices. ».
Mais les pertes ne s’arrêtent pas là. « Nos stocks sont bientôt vides, a expliqué un producteur de neufchâtel à Nesle-Hodeng, en larmes. En plus, on ne sait plus quoi dire aux clients qui remettent en cause nos produits. ». Certains éleveurs redoutent même la perte de leur label. De plus, le préjudice n’est pas que financier, il est aussi moral. « La somme du préjudice est colossale, assure Xavier François, président du Pôle d’équilibre territorial et rural du pays de Bray. J’ai rencontré des agriculteurs au fond du trou à la DDTM. Ne risque-t-on pas de voir encore plus de suicides dans les mois ou années à venir ? C’est toute l’image du territoire qui a pris un coup. ».
Le gouvernement a évalué les dommages
Ce vendredi, le ministre de l’Agriculture et de l’Alimentation Didier Guillaume a indiqué que l’incendie de l’usine chimique Lubrizol a causé aux agriculteurs (plus de 3000) un préjudice global estimé « entre 40 et 50 millions » d’euros. Le ministre a parlé d’un « drame économique mais c’est aussi d’un drame humain », évoquant notamment quatre millions d’euros de pertes pour les producteurs de lait. Pour lui, « l’urgence de l’urgence c’est le laitier » même s’« il faudra que tous les secteurs soient indemnisés le plus vite possible ». Didier Guillaume a aussi promis qu’il n’y aurait « pas de labels Bio qui sauteront » pour les producteurs touchés par les conséquences du nuage.
L’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation (Anses) va probablement rendre les conclusions de ses analyses et son avis le mardi ou mercredi prochain. Si cet avis est favorable, le préfet de Seine-Maritime Pierre-André Durand promet de lever immédiatement son arrêté imposant les restrictions aux agriculteurs.