Hérault : un été ensoleillé mais des dépenses en berne

Derrière les terrasses pleines, les restaurateurs et commerçants constatent une baisse nette des dépenses touristiques.
Des touristes présents… mais plus prudents
Sur le papier, la saison estivale avait tout pour plaire : un soleil généreux, des plages pleines, et une offre touristique variée. Pourtant, les chiffres disent autre chose. En juillet, l’Hérault a enregistré 9,5 millions de nuitées touristiques, soit une baisse de 6 % par rapport à l’année précédente. La tendance touche à la fois le littoral, l’arrière-pays et les centres urbains. Les visiteurs étrangers — Allemands, Belges, Néerlandais ou Espagnols — reculent de 10 %, tandis que les Français, souvent venus du Rhône, de Haute-Garonne ou d’Île-de-France, se montrent légèrement moins nombreux. Le climat est pourtant idéal, ce qui souligne que la baisse est davantage liée au budget qu’à l’attrait de la destination.
À Sète, Michel Di Blasi, restaurateur, voit ses tables remplies… mais ses additions s’alléger. « Cet été, on voit des clients se partager un plat pour une personne », confie-t-il. Les entrées disparaissent, les desserts aussi, et même l’eau devient un poste de coût : la seconde bouteille est désormais facturée un euro. Le phénomène est visible dans tout le département : les consommateurs privilégient l’essentiel et coupent dans les “extras”. Les commerçants s’adaptent, souvent contraints de réduire leurs marges pour rester attractifs.
Le camping de l’Arnel, à Villeneuve-lès-Maguelone, affiche complet : 160 mobil-homes, 800 personnes par jour, et une liste d’attente pour tentes et caravanes. Pourtant, même dans ce cadre abordable — repas à 10 euros, semaine entre 700 et 1 000 euros —, le gérant Nicolas Thevenin note que ses clients surveillent leurs dépenses annexes. Les vacanciers viennent pour le soleil et la mer, mais hésitent avant de dépenser pour des activités supplémentaires. La prudence budgétaire est devenue un réflexe.
Chercher la fraîcheur… et optimiser le budget
La grotte de Clamouse, dans l’arrière-pays, connaît un été exceptionnel, avec plus de 60 000 visiteurs attendus et une hausse de 15 % de fréquentation étrangère. Les épisodes de canicule renforcent l’attrait du lieu, mais le succès ne tient pas qu’à la fraîcheur : petit train panoramique, escape game complet une semaine à l’avance, spéléoparc… tout est pensé pour retenir les familles sur la journée entière. Les réservations en ligne, qui représentent 90 % des ventes, offrent en prime une réduction bienvenue : 2 euros par personne, soit 10 euros pour une famille de cinq.
À Montpellier, Élodie, venue de Lyon avec ses deux enfants, a dû arbitrer : « L’aquarium, c’est 70 euros, ça pique. On préfère le Jardin des Plantes et les balades dans l’Écusson. » Cette logique se retrouve chez Johan et Marieke, un couple belge en camping, qui ont sélectionné un hébergement avec piscine et accès direct à la plage afin d’éviter des dépenses en activités payantes. Leur programme se résume à des marchés nocturnes, rencontres avec producteurs et baignades, le tout à coût nul.
Pour Lucie, étudiante parisienne en vacances à Frontignan, l’été rime avec convivialité plutôt qu’avec sorties onéreuses : « Les visites payantes, ce sera pour un autre été. Là, on profite du soleil et des copains. » Les happy hours rythment ses journées, et les moments gratuits — baignades, pique-niques, promenades — prennent le pas sur les loisirs marchands. Cette tendance traduit une évolution des attentes : profiter pleinement, mais dans la limite d’un budget strictement défini.
Entre inquiétude et espoir pour la fin de saison
Le locatif affiche une santé apparente : +5 % en juin-juillet, +4 % attendus en août, +7 % prévus en septembre. Mais ces hausses ne masquent pas la baisse de consommation sur place. Les hébergeurs remplissent leurs plannings, tandis que les restaurateurs et commerçants peinent à compenser la baisse du ticket moyen.
Pour de nombreux professionnels, août reste le mois clé, celui qui peut faire basculer la saison dans le positif. Certains espèrent que les touristes de dernière minute, souvent plus dépensiers, compenseront la prudence observée en juillet. Mais l’incertitude plane : les vacanciers comparent désormais plus, réservent plus tard et adaptent leurs plans en fonction des offres et de la météo.
Pour Nicolas Thevenin, la fidélisation passera par l’excellence du service : « Les touristes ne sont pas des vaches à lait. Si vous leur donnez de mauvais produits ou un service froid, ils ne reviendront pas. » Dans un contexte où chaque euro compte, l’expérience client devient le meilleur levier de retour. Les professionnels qui sauront conjuguer prix raisonnables et accueil chaleureux pourraient tirer leur épingle du jeu dans une saison marquée par la prudence.